vendredi 29 mai 2015

Musique de film - Cosma et Delerue

Le premier petit film ci dessous touche juste. Cosma a colonisé aussi ma jeunesse. Ses rythmes, sa France, ses mélodies. Il utilisa son talent de compositeur pour imprimer une identité forte aux films dont il avait la responsabilité.
Plus bas, vous trouverez des exemples de Georges Delerue, autre compositeur français spécialisé dans la musique de films.
Deux talents différents mais deux images de la création musicale du XXième siècle. Création passée à coté du modernisme et se trouvant un pré d'herbe fraîche libre. Une musique libérée du désir d'originalité par l'obligation de parler aux spectateurs contemporains, de leur parler clairement au risque de copier, d'imiter des grands maîtres passés. De parler et de décrire aussi. Bref retrouver le langage musical et donc d'utiliser la vieille grammaire que nos oreilles comprend et apprécie, puis réaliser de véritables chef d’œuvres...





A ce propos source intéressante
L'aile ou la cuisse


 Le château de ma mère




Delerue


 Platoon




dien bien phu


vivement dimanche


La nuit américaine
g

lundi 18 mai 2015

Girard, Kundera et Anatole France

Au cours d'une émission radiophonique dédiée à René Girard (émission intéressante qui fera certainement l'objet d'une future note.) la journaliste organise une rencontre entre René Girard et Milan Kundera, célèbre romancier franco-tchèque. La journaliste témoigne d'une complicité naturelle. 
C'est évident. Mais, ici-même, sur quoi se base leur entente ?

-La justesse et le réalisme de la dimension mimétique du désir et de la recherche du bouc-émissaire
-On ne comprend bien la politique que quand nous en sommes vraiment extérieur... Les romanciers le sont suffisamment pour nous éclairer en fin sur l'au delà de la politique. 
-Car l'art du roman est anthropologie, science totale de l'homme. Honneur de l'occident qui tend à l'oublier. 
-Les romans sont les vrais sources historiques et non les archives... Faulkner dit bien plus sur l'apartheid du sud des USA que les archives journalistiques ou historiques de l'époque...
Kundera note, enfin, qu'il y a peu de livres sur la révolution française et que ceux ci sont peu plébiscité par les médias et les librairies en ces temps de bicentenaire. Il évoque alors son intérêt pour le livre d'Anatole France, les dieux ont soifs. Girard et Kundera se retrouvent alors sur ce livre et lui rendent un hommage. Non, les vrais romans ne sont jamais avec la révolution. Anatole France  est poussé par le génie littéraire contre sa propre pensée politique....

Les romans sont les pensées des auteurs bien plus que toutes leurs interviews ou lettres. La vie des écrivains n'est pas le dernier mot sur leurs livres, bien au contraire...

Dans ces passages, Girard avoue qu'il aurait rajouté Kundera dans Mensonge romantique et vérité romanesque (ainsi que Virginia Woolf) s'il l'avait connu plus tôt. Il pense alors particulièrement à la description par Kundera du réflexe romantique de l'homme moderne pensant l'homme bon et recherchant les autres le rendant mauvais...

Au final, c'est une interview émouvante entre deux génies, toute simple, la reconnaissance du roman comme ce qui nous guide sur le chemin de l'énigme humaine
Les choses importantes ne sont elle pas simples...

Pour ceux qui veulent aller plus loin, je conseille le merveilleux livre d'Anatole France Les dieux ont soif sur la  révolution français d'un point de vue incarné et anthropologique et enfin un livre que je n'ai pas lu, the book of imitation and desire de Trevor Merill, livre sur Kundera lu à partir des travaux de Girard.












Plus bas, petite retranscription sauvage.

lundi 4 mai 2015

Bernard Maris et la fraternité anonyme

Interviewé par la télévision belge, peu avant sa mort tragique dans les locaux de Charlie Hebdo, on retrouve en condensé le peu que je connaissais de Bernard Maris. Ce portrait intellectuel qui jongle entre ses propres livres et sa production éditoriale ressemble à un testament. Ce testament fait curieusement beaucoup écho à ce propre blog. Cela me surprend peu car j'appréciais certaines de ses sorties médiatiques. 
Ne représente t-il pas pour moi l'homme de gauche qui doute et médite, rempli de générosité et du tragique de l'existence, tragique qu'il faut tenter d'embrasser comme la croix du Christ dont elle n'est peut-être que l'ombre sur nos vies et qu'il a, semble-t-il, voulu reprendre dans ses bras...
Laïcité, capitalisme, violence, la quête vibrante de communion de cet auteur a cessé brusquement par un fusil situé à la convergence de ces trois questions qu'il n'a cessé de creuser. Espérons qu'elle a trouvé sa résolution dans les bras du Père et non dans des bras anonymes....



Laïcité
Bernard Maris pose le portrait d'une laïcité douce, elle ne serait pas "de combat" elle est le rêve raisonnable d'une société qui ne croit plus à la folie de la non réciprocité violente du christianisme. Elle est la fraternité en acte, la décence commune. Elle est le rêve de "fraternité anonyme", la cristallisation de l'altruisme inhérent à l'homme et qui nous fait homme. Le religieux n'est pas vraiment l'ennemi de la laïcité mais c'est l'effondrement du social qui en brise les espoirs. 
Je crois que le diagnostic est juste mais il montre surtout le malentendu, souvent de gauche, que porte Bernard Maris. Le religieux est extérieur à l'homme et est une dimension ajoutée. Le rêve de pentecôte et de fraternité devient "anonyme", ironie de l'expression qui comprend le désir et le besoin de communion fraternelle humaine mais qui refuserait de porter le regard sur le Père ou le frère par excellence, Jésus.
Il ne reste qu'un malentendu entre personnes de bonne volonté et une laïcité trop légère pour porter sur ses épaules un besoin eschatologique....

Capitalisme
Celui-ci se donne comme vocation d'absorber toute métaphysique, foi et superstition. La relation marchande se substitue à toute relation véritablement humaine possible. L'argent est l'arme de destruction massive de toute relation humaine éprouvée, le capitalisme en est le stratège. Fausse égalité, hyper narcissisme, hyper individualisation, société confortable mais âpre et dure, sans plus aucune consolation, elle tue tout altruisme et coopération. Processus mortifère et suicidaire. Nous perdons tout...
Il a écrit un livre sur Houellebecq économiste. Il est selon lui l'auteur de la fin du capitalisme. La fin des relations humaines mangées par les relations marchandes, le malthusianisme, la réflexion sur l'utilité.
Maris nous invite aussi à connaitre Freud, Keynes et Marx, ils se sont bien trompés mais ils nous ont donné des indices merveilleux pour comprendre notre monde. Infantilisation du capitalisme en pleine hubris et sans limite sauf celles de la terre. Bidonvillisation du monde malthusien (la possibilité d'une île). Quête absurde d'une productivité qui lutterait contre la rareté. Contre productivité (Illich), promiscuité et catastrophisme que nous savons mais que nous ne croyons pas (Dupuy). Nous allons tous en mourir.
Les socialistes ont trop cru qu'il pouvait construire le paradis sur terre, ce sont des chrétiens qui ont perdu le paradis. (thèse proche de celle de Hadjadj)
Cela nous donne un capitalisme créateur d'irresponsables immatures, endettés croyant à la vie éternelle par la productivité... Mais, en fait, nous avons peur de la mort ! Trouvons le juste milieu et osons vivre ! Nous ne faisons que perdre notre vie à la gagner.


Violence
Bernard Maris a écrit un livre sur la perception de la première guerre mondiale par deux grands hommes qui en ont survécu et se sont probablement battu l'un contre l'autre. Maurice Genevoix (son propre beau-père) et Ernst Junger. (à ce propos, ne soyons pas dupes, "les artistes sont les sentinelles et les voyants de notre monde") A leur suite, il affirme avec force, ne nous faisons pas de film, nous aimons la guerre, les hommes peuvent aimer la cruauté, la guerre apporte une sensation de plus d'être à eux qui la font, c'est un moment exceptionnel et fraternel mais avant tout une maladie destructrice et abjecte....
Malgré tout, Hollande et Merkel, c'est mieux que tout cela, il faut éprouver et voir notre part noire ("Nous ne sommes pas bons !")qui nous est constitutive comme notre altruisme. Il donne comme image un tableau de Goya de deux hommes préférant continuer à se battre alors qu'ils sont tous les deux pris dans le sable mouvant. Mimétisme et montée aux extrêmes !







 Quelques notes...